Contexte économique et financier de l’Opéra (en France), enjeux et perspectives

Opéra : institution publique ou privée qui organise la représentation d’œuvres d’opéra. Peut regrouper compagnie permanente, services administratifs et techniques, et engage des artistes non permanents, selon la programmation annuelle.

C’est une personnalité morale, autonome financièrement, un service public distinct de l’Etat qui apporte des subventions indispensables au bon fonctionnement de l’opéra (l’Etat directement ou autres collectivités territoriales)

Influencé par contexte économique (tributaire de mécènes, financements publiques, donc liés à économie mondiale)

1. La production d’un opéra en France

  1. 1 Diversité des productions

3 modèles de production artistique et technique dans années 60: l’Opéra Répertoire, le modèle Stagione, et festivals d’art lyrique àmaison de Répertoire coûte moins cher par représentation que les maisons de Stagione.

- Production d’un opéra diffère selon s’il est nouveau ou si repriseàcoût différent (dans nouveau tout est à faire, de la mise en scène au choix des artistes)

- Fréquence des représentations dépend de la grandeur des maisons d’opéra. Celles qui jouent le plus (qui présentent le plus de titres lyriques), reprennent au 2/3 des opéras joués les années précédentesà coûts de production sont donc moindres.

- Moyens sont différents selon que la maison d’opéra dispose de son propre orchestre, chœur, ou troupe (va jouer dans différents opéras par la suite), ou si elle met à disposition des activités payantes destinées au public.

- Les musiciens, choristes, voire danseurs, peuvent être permanents

- Opéras qui programment plus d’œuvres contemporaines présentent des œuvres dans de petits théâtres àcoûts par place élevés.

- Personnels permanents fonctionnaires, ou contractuels (règles de droit privé, alors).

1.2 Le fonctionnement actuel

- Relèvent de tutelles (municipales, régionales ou nationales), le plus souvent en statut de régie (cf. Opéra de Dijon). Tutelles exercent un contrôle sur certaines activités (ex : gestion du budget).

- 20 % des opéras sont des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), régime financier, budgétaire et comptable différent : doivent gérer un état annuel de prévisions et de dépenses. Le statut du personnel diffère également.

- Mondialisation a touché ce milieu depuis des années et cela s’accélère: comédiens et chanteurs voyagent. Les productions sont plus coûteuses car nouvelles technologies chères, améliorent les décors. Les metteurs en scène ont plus de pouvoir…

- Exemple : Opéra de Dijon : 2 ou 3 opéras / an sont produits par eux, de A à Z. Deux sont seulement coproduits. 70000 spectateurs/an (+ 20.000 avec actions hors les murs). 70 projets/saison proposés, pour 110 levers de rideaux. Utilise des artistes en résidence pour tisser liens avec le public.

2. Dépenses

En France, concept du théâtre en « ordre de marche »: autorités publiques financent les opéras, avant même choix des programmes. Personnel permanent donc considéré comme un coût fixe, et personnel temporaire et intermittent comme coût variable. 2 blocs de dépenses : TOM et artistique.

2.1 Les dépenses liées à l’artistique

- L’ensemble des coûts « plateau » nécessaires à la production du spectacle : rémunérations des artistes invités, dépenses de costumes, décors et accessoires, metteur en scène, chef d’orchestre, chorégraphe, éclairagiste et chef costumier, distribution (artistes et mimes) et droits d’auteur.

- Enjeu financier majeur : l’orchestre, d’où choix d’orchestre de fosse souvent (permanent). Autre élément devenu important : le metteur en scène, différents cachets aussi conséquents que celui des solistes

- Ce bloc diffère selon stratégie de l’Opéra ex : l’Opéra national de Paris, budget pour spectacles = 38 millions €/ an, = 20% environ du budget à l’Opéra national de Paris. Dijon : Artistique = 60% = 6,3 millions €

- Charges de personnel peuvent être réduites, via rémunération en droits d’auteurs, presta (système de facturation de la prestation), ou formulaires 101 (formulaire pour les étrangers, pas de doubles charges).

2.2 Les dépenses liées au TOM

- Plus de 50% = dépenses du Théâtre en Ordre de Marche (TOM) =frais fixes. Pour Dijon, 4,3millions € soit 40% du budget

- Dépenses de personnel = 70% des dépenses TOM (main d’œuvre nombreuse et qualifiée)

-Rénovation et maintenance des bâtiments (lieux somptueux et qualités techniques comme insonorisation).

- Les prix des billets ne correspondent pas à leur coût réel, d’où besoin de financements d’exploitation

Ex à Dijon, coût moyen par spectateur : 140,71 €, mais prix moyens tickets = 18 € pour concerts et 27 pour opéra. La ville de Dijon alloue en effet 41,63 € par habitant de la ville.

3. Financements

Enjeu est de parvenir équilibrer les ressources et les dépenses, faire du profit n’est pas le but premier (service public)—> chose impossible en France car ressource principale est la billetterie et cela ne suffira jamais à faire du profit.

-3 modèles de financement : Subventions dominantes et billetterie marginale (en France), Dons privés et billetterie (USA) ou Financement mixte.

Ex à Dijon : Subventions collectivités= 84% / Recettes propres = 15,83%

3.1 Les recettes propres

- Les recettes propres des opéras = vente de billets (part billetterie 10 à 20% du total, et 70% des recettes propres), de produits dérivés, diffusions audiovisuelles (20 millions € de recettes dans le cas de l’Opéra national de Paris), vente des programmes de spectacles, tournées du chœur, de l’orchestre ou du ballet, ainsi que des financements privés via le mécénat (2% des recettes propres en moyenne), et vente d’espaces publicitaires

- Location de spectacles à d’autres institutions artistiques et coproduction permettent recettes et économies (le coût des spectacles est alors divisé).

3.2Les financements publiques

Financement publique provient de l’Etat, la région ou les collectivités locales. En général 70 à 90% des revenus (taux record de 92,45% à l’Opéra de Nice)

Budget opéra de Dijon : 11millions € environ : 6,5 millions € par la ville, 300000 € département, 1Million € région, 500000 € Etat.

4. Enjeux et perspectives

4.1 Une gestion difficile

- Financement des collectivités = participation, même indirecte, dans la gestion et les décisions.

Ex : Redressement Opéra National de Paris à partir de 2004 : recadrement sur le plan stratégique et financier. Encadrement pluriannuel de l’Opéra. 16 réunions financières annuelles (très lourd).

-Subventions réellement reçues parfois inférieures à celles promises, jeu comptable complexe.

Ex : subvention de l’Opéra National de Paris bloquée à 103 millions €/ an, l’opéra doit faire preuve de « créativité budgétaire » et augmenter ressources propres, repenser son modèle de financement et sûrement faire davantage appel au secteur privé.

-Le système de fixation des prix, la dimension des jauges, trop réduite, et le taux de remplissage des salles = complexité

4.2 Des stratégies nécessaires

- Réduction des coûts peut passer par externalisation des ressources, partage des coûts et risques avec d’autres théâtres (mise en commun de ressources, coproductions, locations, tournées).

- Notoriété des artistes invités augmente globalement l’autonomie financière des maisons (améliorer remplissage des salles), mais cela contribue également à augmenter ses dépenses. Plus d’autonomie financière dans les théâtres où peu de représentations, mais dans grandes salles bien remplies à dépenser plus est parfois nécessaire.

- Stratégie d’un opéra autant liée à son financement et ses dépenses qu’aux missions assignées aux opéras, tradition de l’établissement, son prestige, la taille de la salle, le droit social, les conditions techniques, les aides de l’Etat…–>Vision d’ensemble nécessaire pour prise de décisions.

àEnjeu actuel: veiller à maintenir des financements publiques en France et augmenter donations privées, pour assurer la pérennité des maisons d’opéra en période de crise.

 

Bibliographie

Ouvrages

  • AGID, Philippe et Jean-Claude Tarondeau (2011), Le Management des opéras : Comparaisons internationales, Descartes & Cie, Paris
  • SAINT CYR, Sylvie (2005), Vers une démocratisation de l’opéra, L’Harmattan, Paris.

Articles

  • LACOMME Jean-Pierre, « Culture, Vive la crise ! » Le Journal du Dimanche, Dimanche 01 Février 2009
  • ROUSSEAU, ANNA, « L’Opéra de Paris joue la créativité budgétaire » Challenges, Février 2011.

Sites Internet

Thèses

  • BERNARDET, Adélaïde (2009) Le rôle des politiques commerciales et marketing dans la réussite financière et culturelle des maisons d’opéra : Une comparaison de l’Opéra national de Paris avec la Stiftung Oper in Berlin, consultable à l’adresse : http://www.opera-management.fr/assets/memoire-a-bernard-et-management-des-operas.pdf
  • WESTERMANN, Christine (2011), Quels sont les effets de la subvention sur l’organisation et l’activité d’un opéra ?, consultable à l’adresse : http://www.opera management.fr/assets/memoire-c-westermann.pdf

Autres

  • Cour des comptes, Rapport sur l’Opéra National de Paris, disponible à l’adresse http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RPA/Suite31-Opera-national-Paris.pdf
  • GAILLARD, Yann (2007), Quatre établissements culturels et leur tutelle, Rapport d’information N° 384 fait au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, Sénat, Session extraordinaire de 2006-2007, Annexe au procès-verbal de la séance du 12
  • LEYMARIE, Olivier, Rencontre à l’Auditorium de Dijon, Présentation des budgets de l’Opéra de Dijon, jeudi 22 septembre 2011.

Sabrina Bouzourene, Elise Iwasinta, Etudiantes Spécialisation CIC, 2011

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