Caractéristiques, actualité, enjeux et perspectives du secteur de l’édition musicale – Synthèse

Caractéristiques, actualité, enjeux et perspectives du secteur de l’édition musicale – Synthèse

Hugo BRUEL & Lilas HAESAERT

1. Définition 

L’édition musicale  

-production d’œuvre musicale enregistrée

- support de disque compact et/ou numérique.
-souvent appelé « Labels Discographique » ou « Maisons de Disques ».

-diffusion de l’œuvre : diffusions audiovisuelles (radio, télévision), représentations vivantes (spectacles, aides aux tournées), synchronisations (reproduction de l’œuvre comme générique d’un film, etc.)
-l’édition musicale est au centre de l’économie de la musique

-secteur indispensable au développement (notoriété, carrière) d’un artiste

 

Un contrat d’édition

-une convention conclue par un auteur cédant à l’éditeur une partie de ses droits d’auteur.

- en France un tiers pour l’éditeur, un tiers pour l’auteur et un tiers pour le compositeur.
-en Belgique et aux États-Unis, c’est la règle 50/50

 

Editeur

-travail de longs termes

-faire connaître une œuvre

-accompagner une carrière (orientation, soutien moral et financier, structure administrative et commerciale)

-création des contrats d’artistes

-création et gestion des licences

-promotion

-partenariats

-diffusion (moyens modernes)

-distribution

 

Disquaire

-élément de diffusion

-nombre de disque vendu en baisse donc raréfaction des disquaires

-développement des disquaires spécialisés

 

2. Les acteurs

-Les majors (labels les plus importants) se partagent l’essentiel du marché mondial

- Universal, 25 %
- Sony Music Entertainment,  21%
- EMI, 13%
- Warner, 11%

-Labels indépendants  35% du marché

            -très nombreux

            -moins couteux

            -moins de capacité à s’engager dans de nouveaux projets

            -moins de savoir-faire

            -plus grande indépendance dans les choix artistiques

            -grande diversité de l’offre

-Auto-producteur

            -développement depuis la crise de 2008

            -développement avec internet

            -possibilité de se faire produire par les internautes et d’être libre de ses choix

-SNEP : Syndicat nationale de l’édition phonographique

            -48membres, portes paroles et représentants auprès de toutes les organisations culturelles et de presse (gouvernement, médias,…)

            -Gère questions économiques et juridiques du secteur

            -Délivre les certifications quand un certain seuil de vente est atteint

            -Baisse des certifications depuis la crise (puisque baisse des ventes)

-CSDEM : Chambre syndicale des éditeurs de musique

            -droit d’auteur face à internet

            -promuscifrance : action pédagogique pour sensibiliser au téléchargement

 

3. L’édition musicale en chiffres

-130 000 personnes travaillent dans ce secteur en 1990 dont 5% dans le classique représentant 6500 personnes en France

-2010 en France :               -4000 personnes sont dans le classique

                                               -10250 titres déposés

                                               -56 millions de disques vendus

                                               -Chiffre d’affaire 512 millions d’euros

                                               -Ventes numériques 76 millions d’euros

-Les ventes : 50% en variété nationale, 25% en variété internationales et moins de 10% de musique classique

-Les réseaux de distributions :     -GSS 55%

                                                           -GSA 32%

                                                           -Internet 7%

- 1er trimestre 2011 en France :

-musiques enregistrées 121,8 millions€ :  -5,2%

-marché numérique : 26,3 millions d’€ : +13,2%

-marché physique : 95,5 millions d’€ : -9,3%

-Pour la première fois chiffre d’affaire du numérique 20% du chiffre d’affaire enregistré

-Résultat spécifique au numérique :

            -vente téléchargement : 13,5 millions d’€ : +7,8%

            -offre streaming financé par la pub : 3,1 millions : +23%

            -revenus abonnement : 5,9 millions : +57%

-Résultat spécifique au physique :

            -chiffre d’affaire : 95,5 millions : -9,3%

                        -audio : -8 ,6%

                        -vidéo : -15,7%

            -chiffre d’affaire du classique : -22%

            -chiffre d’affaire de la variété : +1,9%

            -chiffre d’affaire musique internationale : – 29%

 

5. Actualité
-Musique numérique :       -loi Adopi

                                               -loi Dadusi

                                               -loi création et internet

-L’objectif étant de réguler et organiser les droits d’auteur, le piratage,…

-Charte « 13 engagements » pour la musique en ligne

-Proposition Hoog :                        -gestion collective pour organiser les relations entre producteur et éditeur en ligne

                                               -développer le marché en soutenant la filière à l’échelle Européenne (taux de TVA réduit en ligne)

                                               -accompagner les producteurs avec des crédits d’impôt

-Adoption du rapport Gallo : respect des droits de propriété intellectuelle

-Charte d’engagement entre fournisseurs d’accès internet, filière musicale et pouvoir public

                        -croissance de l’offre légale en ligne

                        -respect propriété intellectuelle 

                        -lutte contre la piraterie

-Création de la carte musique

 

4. Enjeux et perspectives

-En 10 ans : l’édition musicale -50% de chiffres d’affaires.

-S’explique par l’arrivée

-le numérique

-le piratage informatique

-la crise

-Les nouvelles technologies doivent permettre de repenser un nouveau modèle d’édition

- « Discomorphose » de la musique (Hennin, Les professionnels du disque)

-Nouvelle technologie : village global : globalisation des acteurs

-Travail sur de nouvelles niches

-Fidélisation

-Les revenus générés par les ventes de musique en ligne ne compensent pas les pertes sur le marché des supports.
-L’enjeu de l’édition est donc de redéfinir la nature des produits musicaux et des carrières artistiques

-Une cohérence doit exister entre l’artistique et le commercial

-Création d’œuvre d’art lorsque création de disques (emballage, illustrations, livret d’accompagnement, série limitée,…)

 

Bibliographie :

-P. François, La musique une industrie, des pratiques, documentation française, 2008, Paris

-P.Bussy, Guide du disque classique, 2005
-www.disqueenfrance.com
-www.conseilfrancophone.org

-www.snep.fr

-www.csdem.fr

-www.iworksmusic.net

-www.upfi.fr

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Envie d’une soirée orientale envoutante? Samedi, Kamilya Jubran & Sarah Murcia jouent Nhaoul’ à20h pour les Nuits d’Orient

 Envie d’une soirée orientale envoutante? Samedi, Kamilya Jubran & Sarah Murcia jouent Nhaoul’ à 20h pour les Nuits d’Orient au théâtre de Dijon. lien : http://www.opera-dijon.fr/?spectacle=gouter-nuit-d%e2%80%99orient

Ci-dessous, quelques infos complémentaires et même un peu de son :

http://www.bluelineproductions.info/kasa

 

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Caractéristiques, actualité, enjeux et perspectives du secteur de l’édition musicale – Synthèse et Repères

1. Définition 

L’édition musicale

- production d’œuvre musicale enregistrée

- support de disque compact et/ou numérique.
-souvent appelé « Labels Discographique » ou « Maisons de Disques ».

- diffusion de l’œuvre : diffusions audiovisuelles (radio, télévision), représentations vivantes (spectacles, aides aux tournées), synchronisations (reproduction de l’œuvre comme générique d’un film, etc.)
- l’édition musicale est au centre de l’économie de la musique

- secteur indispensable au développement (notoriété, carrière) d’un artiste

 

Un contrat d’édition

- une convention conclue par un auteur cédant à l’éditeur une partie de ses droits d’auteur.

- en France un tiers pour l’éditeur, un tiers pour l’auteur et un tiers pour le compositeur.
- en Belgique et aux États-Unis, c’est la règle 50/50

 

Editeur

-travail de longs termes

-faire connaître une œuvre

-accompagner une carrière (orientation, soutien moral et financier, structure administrative et commerciale)

-création des contrats d’artistes

-création et gestion des licences

-promotion

-partenariats

-diffusion (moyens modernes)

-distribution

 

Disquaire

-élément de diffusion

-nombre de disque vendu en baisse donc raréfaction des disquaires

-développement des disquaires spécialisés

 

2. Les acteurs

-Les majors (labels les plus importants) se partagent l’essentiel du marché mondial

- Universal, 25 %
- Sony Music Entertainment,  21%
- EMI, 13%
- Warner, 11%

-Labels indépendants  35% du marché

-très nombreux

-moins couteux

-moins de capacité à s’engager dans de nouveaux projets

-moins de savoir-faire

-plus grande indépendance dans les choix artistiques

-grande diversité de l’offre

-Auto-producteur

-développement depuis la crise de 2008

-développement avec internet

-possibilité de se faire produire par les internautes et d’être libre de ses choix

-SNEP : Syndicat nationale de l’édition phonographique

-48membres, portes paroles et représentants auprès de toutes les organisations culturelles et de presse (gouvernement, médias,…)

-Gère questions économiques et juridiques du secteur

-Délivre les certifications quand un certain seuil de vente est atteint

-Baisse des certifications depuis la crise (puisque baisse des ventes)

-CSDEM : Chambre syndicale des éditeurs de musique

-droit d’auteur face à internet

-promuscifrance : action pédagogique pour sensibiliser au téléchargement

 

3. L’édition musicale en chiffres

-130 000 personnes travaillent dans ce secteur en 1990 dont 5% dans le classique représentant 6500 personnes en France

-2010 en France :               -4000 personnes sont dans le classique

-10250 titres déposés

-56 millions de disques vendus

-Chiffre d’affaire 512 millions d’euros

-Ventes numériques 76 millions d’euros

-Les ventes : 50% en variété nationale, 25% en variété internationales et moins de 10% de musique classique

-Les réseaux de distributions :     -GSS 55%

-GSA 32%

-Internet 7%

- 1er trimestre 2011 en France :

-musiques enregistrées 121,8 millions€ :  -5,2%

-marché numérique : 26,3 millions d’€ : +13,2%

-marché physique : 95,5 millions d’€ : -9,3%

-Pour la première fois chiffre d’affaire du numérique 20% du chiffre d’affaire enregistré

-Résultat spécifique au numérique :

-vente téléchargement : 13,5 millions d’€ : +7,8%

-offre streaming financé par la pub : 3,1 millions : +23%

-revenus abonnement : 5,9 millions : +57%

-Résultat spécifique au physique :

-chiffre d’affaire : 95,5 millions : -9,3%

-audio : -8 ,6%

-vidéo : -15,7%

-chiffre d’affaire du classique : -22%

-chiffre d’affaire de la variété : +1,9%

-chiffre d’affaire musique internationale : – 29%

 

5. Actualité
-Musique numérique :       -loi Adopi

-loi Dadusi

-loi création et internet

-L’objectif étant de réguler et organiser les droits d’auteur, le piratage,…

-Charte « 13 engagements » pour la musique en ligne

-Proposition Hoog :                        -gestion collective pour organiser les relations entre producteur et éditeur en ligne

-développer le marché en soutenant la filière à l’échelle Européenne (taux de TVA réduit en ligne)

-accompagner les producteurs avec des crédits d’impôt

-Adoption du rapport Gallo : respect des droits de propriété intellectuelle

-Charte d’engagement entre fournisseurs d’accès internet, filière musicale et pouvoir public

-croissance de l’offre légale en ligne

-respect propriété intellectuelle

-lutte contre la piraterie

-Création de la carte musique

 

4. Enjeux et perspectives

-En 10 ans : l’édition musicale -50% de chiffres d’affaires.

-S’explique par l’arrivée

-le numérique

-le piratage informatique

-la crise

-Les nouvelles technologies doivent permettre de repenser un nouveau modèle d’édition

- « Discomorphose » de la musique (Hennin, Les professionnels du disque)

-Nouvelle technologie : village global : globalisation des acteurs

-Travail sur de nouvelles niches

-Fidélisation

-Les revenus générés par les ventes de musique en ligne ne compensent pas les pertes sur le marché des supports.
-L’enjeu de l’édition est donc de redéfinir la nature des produits musicaux et des carrières artistiques

-Une cohérence doit exister entre l’artistique et le commercial

-Création d’œuvre d’art lorsque création de disques (emballage, illustrations, livret d’accompagnement, série limitée,…)

 

Bibliographie :

  • -P. François, La musique une industrie, des pratiques, documentation française, 2008, Paris
  • -P.Bussy, Guide du disque classique, 2005
    -www.disqueenfrance.com
    -www.conseilfrancophone.org
  • -www.snep.fr
  • -www.csdem.fr
  • -www.iworksmusic.net
  • -www.upfi.fr

Hugo BRUEL & Lilas HAESAERT, Etudians, Spécialisation CIC, 2011.


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Table ronde « Financement de la culture : échange comparatif entre les modèles anglais et français » (ESC Dijon, 14 novembre 2011 à 17h, salle B 314)

Participants :

Maureen McCulloch (Professeur, Oxford Brookes University), Lisa Van Reeth (Consultante experte en projets culturels), Pierre Pellerin (Directeur Zetik Production, communication et Mécénat)

Table ronde animée par Dr Edwin Juno Delgado et Dr Christine Sinapi (Professeurs, ESC Dijon – pôle Culture et Industries Créatives).

Objet :

Depuis toujours, la création artistique et culturelle requiert des apports de fonds extérieurs, complémentaires aux seules recettes générées par l’exploitation des créations. Quelques images d’Epinal étayent cette idée : mécènes éclairés de la Renaissance tels Laurent de Médicis, dit le Magnifique ou Louis XIV, administration publique « à la  » française via une structure hiérarchisée : Ministère, DRAC, collectivités territoriales, modèles dits « anglo-saxons » de financement par des fonds privés … Au-delà de ce qui les rapproche, ces modèles se déclarent aujourd’hui tous « en crise ». Manque de financement, modèles inadaptés aux mutations actuelles, difficulté d’accès aux fonds, complexité des systèmes … Les modèles de financement de demain restent à inventer.

L’expertise des participants à la table ronde et leur expérience tentera de contribuer à cette vaste réflexion, guidée par quelques questions clés :

1-   Origine des financements en France vs. UK : des modèles vraiment différents?

2-   Spécificités, avantages et difficultés inhérents à ces deux modèles

3-    Conditions d’accès aux financements, incitations économiques et fiscales, etc. : les cas des Charities, du mécénat, des attributions de fonds publics.

4-   Quelles perspectives pour demain? Un nouveau paradigme européen est-il possible?

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Patrimoine culturel et identité dans l’ « Aldée globale »

La notion de patrimoine dont l’origine se trouve dans le droit économique et privé[1] a subi au cours de ces dernières décennies une évolution constante. «Loin d’être fixe et figé, le patrimoine est continuellement fait et refait par les déplacements, les contacts, les interactions, et les échanges entre individus et groupes différents»[2]. Il faut reconnaître que le patrimoine au sens large (patrimoine culturel, naturel et intangible) connaît aujourd’hui un grand succès.

En effet, partout sur la planète, un grand nombre d’organisations, des entités privées et publiques, internationales, nationales et locales ont pris conscience de l’importance du patrimoine. Certes, les législations se sont tout d’abord attachées à la notion stricto sensu de «patrimoine», c’est-à-dire à la conception de droit civil qui considère le patrimoine comme l’ensemble des biens privés aliénables, or cette notion a servi à créer, plus récemment, un Régime par analogie qui s’applique aux biens portant témoignage d’époques ou de civilisations.

Depuis un premier stade de construction et d’acquisition du patrimoine, nous sommes passés au stade de préservation et d’appréciation[3], de la «conservation des monuments architecturaux à celle des sites, de la “patrimonialisation” du bâti à celle de la nature et de l’environnement»[4] mais l’évolution ne s’arrête pas là, car «le concept de patrimoine est une production culturelle liée à l’histoire. Aujourd’hui, nous sommes conscients de l’existence de notre propre patrimoine – local, ethnique, de classe, national- mais aussi de celui d’autres peuples, d’autres nations, en particulier du patrimoine à forte valeur symbolique des grandes civilisations d’Orient et d’Occident»[5].

Aujourd’hui, d’une part, il ne s’agit pas seulement d’objets dits «nobles», mais tout produit de la culture populaire et de masse (de l’artisanat, du langage, des rites, des festivités, des affiches, etc.) peut être considéré à juste titre comme patrimoine, ainsi comme dit Lowenthal, presque tout peut être considéré comme patrimoine[6]. D’autre part, la question du temps et de l’ancienneté des objets ne tient pas la route parce que ce qui a été produit hier, peut dès aujourd’hui revendiquer un statut de patrimoine. Cette évolution montre que le patrimoine est une notion dynamique, élargie et qui «surplombe le temps»[7]. Ainsi, la notion de patrimoine doit être étudiée à partir d’une vision holistique et globale.

En premier lieu, il faut signaler l’action de l’«United Nations Educational, Scientific and Cultural Organisation» (UNESCO), qui avait été créée afin de protéger le patrimoine, considéré d’importance mondiale contre les dégradations ou destructions lors de conflits armés[8]. Puis son champ d’action s’est élargi vers un système plus complet de protection, de prévention et de préservation. En effet, depuis sa création, l’UNESCO à travers ses actions permanentes a propulsé la notion de patrimoine vers une acceptation internationale, la notion de «patrimoine mondial de l’humanité» établie en 1972 en est l’exemple. Elle se justifie par la nécessité de préserver certains sites des destructions, et s’inscrit aussi dans le contexte de l’essor de l’industrie touristique. Mais l’action de l’UNESCO souligne aussi, en même temps, le besoin de mettre en place un système moderne de protection, de préservation des sites et des monuments qui soit continuellement dynamisé par le biais d’instruments internationaux. Dans ce sens, il faut se référer en premier lieu à la Convention pour la protection du patrimoine culturel et naturel, mais aussi au Sommet de la Terre ou à la Conférence des Nations Unies sur les problèmes de l’environnement tenue à Rio de Janeiro en 1992, suivie des Conférences de Kyoto et de Nairobi. Mais aussi cette dynamique a été alimentée par le biais d’actions concrètes de sauvegarde et d’actions symboliques comme par exemple la proclamation par les Nations Unies de l’année 2002 en tant qu’année pour le patrimoine culturel («United Nations Year for Cultural Heritage»), et finalement par l’intermédiaire de rencontres (séminaires, tables rondes, débats, etc.) dans le milieu scientifique, académique et associatif.

En deuxième lieu, il faut noter le lien entre l’essor du phénomène de la mondialisation et celui du patrimoine. Certes, nous ne pouvons dire que la relation entre mondialisation et patrimoine est une relation de cause à effet, mais, nous ne pouvons nier que ces vingt dernières années, ces deux phénomènes se rencontrent et se confrontent à plusieurs reprises. En fait, la mondialisation qui est «un phénomène aux contours incertains et un discours où coexistent plusieurs approches idéologiques»[9] confrontée à la notion de patrimoine, fait ressortir cette multiplicité d’approches idéologiques dont Fritz parle.

D’une part, grâce à l’essor des moyens de communication et de transport qui ont rendu le monde en une «aldée globale» chaque fois plus «proche», les monuments et les sites autrefois lointains et exotiques, ont subi aujourd’hui une espèce d’appropriation «virtuelle» de la part de tous les hommes partout dans le monde. Ainsi, ces monuments et sites sont considérés comme appartenant à tous, à toute l’humanité d’où la naissance du débat sur la notion de patrimoine commun de l’humanité[10]. Dans la même logique des choses, l’évolution des moyens de communication et de transmission des données a éliminé virtuellement la distance qui nous sépare de ces sites et monuments. Ce phénomène a produit une prise de conscience de la dévastation de la nature et de la crise environnementale que le monde entier traverse, mais aussi une prise de position concernant les affaires de destruction de monuments et de sites archéologiques, comme la destruction des grands Bouddhas d’Afghanistan par le Régime des Talibans en 2001 qui avait provoqué une vague de protestations partout dans le monde[11]. Cette disparition virtuelle des distances a également déclenché l’explosion du tourisme à tel point qu’aujourd’hui le tourisme est parfois lui-même une menace pour ces mêmes sites et monuments.

En outre, la mondialisation produit un autre phénomène lié au patrimoine : le réveil des identités et la remise en cause de la construction de la Nation. «Le patrimoine d’un pays est par essence son identité culturelle, et qu’il soit grand ou petit, majestueux ou simple, matériel ou immatériel, il doit être conservé et avoir une signification pour toutes les générations futures».[12] Dans le processus de mondialisation, et plus précisément dans le contexte d’enjeu culturel mondial dont Houtart et Rémy nous parlent, il s’est produit une sorte d’enracinement identitaire car confrontée à d’autres cultures, (plus globales, plus puissantes en termes économiques et technologiques) notre identité est constamment redéfinie et remise en cause.

Dans cette situation, la recherche et l’appropriation des «preuves» tangibles et intangibles qui légitiment, identifient et relient les membres d’une communauté entre eux s’avère être une tâche urgente pour de nombreux États. Dans une sorte de compétition dont le but est de faire prévaloir des valeurs culturelles propres : «C’est loin d’être une compétition égale, mais l’histoire des cultures montre que la force n’est pas toujours la garantie du succès et que les représentations et les valeurs du faible s’introduisent dans les interstices du fort, lui faisant la nique, comme base des résistances et germe des synthèses ultérieures»[13].

Le patrimoine donc, est une sorte d’empreinte de chaque peuple, et en même temps un facteur déterminant dans le développement culturel, social et économique. La force du patrimoine, c’est sa diversité et sa dynamique. D’une part, il constitue une expression d’un savoir collectif et pluridisciplinaire, et d’autre part, il signifie non seulement le lien avec le passé mais aussi une dynamique entre les générations passées, présentes et futures. Car, en faisant une extrapolation de ce que le philosophe Søren Kierkegaard a déjà dit «pour comprendre la vie, il faut se tourner vers le passé, mais pour vivre, on doit se tourner vers l’avenir». Le patrimoine renvoie à notre propre identité culturelle dont les racines plongent dans le passé, se dynamisent au présent et se dirigent vers le futur.


[1] Le patrimoine est un «concept ancien qui tire son origine du Patrimonium romaindes, les biens privés aliénables», LAMY, Yvon, «Le creuset du patrimoine collectif », in LAMY, Yvon (sous la dir.), L’alchimie du patrimoine, p. 11.

[2] TURGEON, Laurier, Patrimoines métissés, contextes coloniaux et postcoloniaux, Paris, Editions de la Maison des Sciences de l’Homme, Les Presses de l’Université, Laval, 2003, p.18.

[3] Cf. BABELON, J.P. et CHASTEL, A., «La notion de patrimoine», in Revue de l’Art, CNRS, N° 49, 1980, p. 13.

[4] INSTITUT DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN ÉDUCATION A L’ENVIRONNEMENT, Patrimoine et Éducation à l’environnement, fiche thématique N° 10, IFREE-ORE, décembre, 2001.

[5] GRABURN, Nelson, «Une quête d’identité», in Museum International, Unesco, N° 3, 01/09/1998, p.16.

[6] Cf. LOWENTHAL, David, Possessed by the Past: The Heritage Crusade and the Spoils of History, Free Press, New York, 1996.

[7] ROBINE, Nicole, Des usages du mot ; p. 44.

[8] A l’origine, il s’agissait uniquement du patrimoine archéologique ou architectural et des collections muséales. La réussite dans la mission de déplacement du temple égyptien d’Abou Simbel en 1960 donna à cette organisation un acquis, un important rayonnement moral concernant la protection et la préservation du patrimoine partout dans le monde.

[9] FRITZ, Jean-Claude, «Introduction», in APOSTODOLIS, Charalambos, FRITZ, Gérard et FRITZ, Jean-Claude, L’humanité face à la mondialisation, l’Harmattan, Paris, 1997, p. 11.

[10] Cf. A ce propos il faut lire APOSTODOLIS, Charalambos, FRITZ, Gérard et FRITZ, Jean-Claude, L’humanité face à la mondialisation, l’Harmattan, Paris, 1997.

[11] Des articles apparus dans les principaux journaux du monde entier qui qualifient cette action comme un «crime contre l’humanité», notamment l’article de MATSUURA, Koichiro, directeur de l’UNESCO, «Los crímenes contra la cultura no deben gozar de impunidad», in El País, du 19 mars 2001.

[12] PEI, I.M., «La mémoire n’est pas que de pierres», in Courrier de l’Unesco, décembre 2000

[13] HOUTART, François et REMY, Anselme, Haïti et la mondialisation de la culture. Etude des mentalités et des religions face aux réalités économiques, sociales et politiques, CRESFED, l’Harmattan, Paris, 2000, p. 11.

Edwin Juno-Delgado, Responsable de la Spécialisation CIC

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Contexte économique et financier de l’Opéra (en France), enjeux et perspectives

Opéra : institution publique ou privée qui organise la représentation d’œuvres d’opéra. Peut regrouper compagnie permanente, services administratifs et techniques, et engage des artistes non permanents, selon la programmation annuelle.

C’est une personnalité morale, autonome financièrement, un service public distinct de l’Etat qui apporte des subventions indispensables au bon fonctionnement de l’opéra (l’Etat directement ou autres collectivités territoriales)

Influencé par contexte économique (tributaire de mécènes, financements publiques, donc liés à économie mondiale)

1. La production d’un opéra en France

  1. 1 Diversité des productions

3 modèles de production artistique et technique dans années 60: l’Opéra Répertoire, le modèle Stagione, et festivals d’art lyrique àmaison de Répertoire coûte moins cher par représentation que les maisons de Stagione.

- Production d’un opéra diffère selon s’il est nouveau ou si repriseàcoût différent (dans nouveau tout est à faire, de la mise en scène au choix des artistes)

- Fréquence des représentations dépend de la grandeur des maisons d’opéra. Celles qui jouent le plus (qui présentent le plus de titres lyriques), reprennent au 2/3 des opéras joués les années précédentesà coûts de production sont donc moindres.

- Moyens sont différents selon que la maison d’opéra dispose de son propre orchestre, chœur, ou troupe (va jouer dans différents opéras par la suite), ou si elle met à disposition des activités payantes destinées au public.

- Les musiciens, choristes, voire danseurs, peuvent être permanents

- Opéras qui programment plus d’œuvres contemporaines présentent des œuvres dans de petits théâtres àcoûts par place élevés.

- Personnels permanents fonctionnaires, ou contractuels (règles de droit privé, alors).

1.2 Le fonctionnement actuel

- Relèvent de tutelles (municipales, régionales ou nationales), le plus souvent en statut de régie (cf. Opéra de Dijon). Tutelles exercent un contrôle sur certaines activités (ex : gestion du budget).

- 20 % des opéras sont des établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC), régime financier, budgétaire et comptable différent : doivent gérer un état annuel de prévisions et de dépenses. Le statut du personnel diffère également.

- Mondialisation a touché ce milieu depuis des années et cela s’accélère: comédiens et chanteurs voyagent. Les productions sont plus coûteuses car nouvelles technologies chères, améliorent les décors. Les metteurs en scène ont plus de pouvoir…

- Exemple : Opéra de Dijon : 2 ou 3 opéras / an sont produits par eux, de A à Z. Deux sont seulement coproduits. 70000 spectateurs/an (+ 20.000 avec actions hors les murs). 70 projets/saison proposés, pour 110 levers de rideaux. Utilise des artistes en résidence pour tisser liens avec le public.

2. Dépenses

En France, concept du théâtre en « ordre de marche »: autorités publiques financent les opéras, avant même choix des programmes. Personnel permanent donc considéré comme un coût fixe, et personnel temporaire et intermittent comme coût variable. 2 blocs de dépenses : TOM et artistique.

2.1 Les dépenses liées à l’artistique

- L’ensemble des coûts « plateau » nécessaires à la production du spectacle : rémunérations des artistes invités, dépenses de costumes, décors et accessoires, metteur en scène, chef d’orchestre, chorégraphe, éclairagiste et chef costumier, distribution (artistes et mimes) et droits d’auteur.

- Enjeu financier majeur : l’orchestre, d’où choix d’orchestre de fosse souvent (permanent). Autre élément devenu important : le metteur en scène, différents cachets aussi conséquents que celui des solistes

- Ce bloc diffère selon stratégie de l’Opéra ex : l’Opéra national de Paris, budget pour spectacles = 38 millions €/ an, = 20% environ du budget à l’Opéra national de Paris. Dijon : Artistique = 60% = 6,3 millions €

- Charges de personnel peuvent être réduites, via rémunération en droits d’auteurs, presta (système de facturation de la prestation), ou formulaires 101 (formulaire pour les étrangers, pas de doubles charges).

2.2 Les dépenses liées au TOM

- Plus de 50% = dépenses du Théâtre en Ordre de Marche (TOM) =frais fixes. Pour Dijon, 4,3millions € soit 40% du budget

- Dépenses de personnel = 70% des dépenses TOM (main d’œuvre nombreuse et qualifiée)

-Rénovation et maintenance des bâtiments (lieux somptueux et qualités techniques comme insonorisation).

- Les prix des billets ne correspondent pas à leur coût réel, d’où besoin de financements d’exploitation

Ex à Dijon, coût moyen par spectateur : 140,71 €, mais prix moyens tickets = 18 € pour concerts et 27 pour opéra. La ville de Dijon alloue en effet 41,63 € par habitant de la ville.

3. Financements

Enjeu est de parvenir équilibrer les ressources et les dépenses, faire du profit n’est pas le but premier (service public)—> chose impossible en France car ressource principale est la billetterie et cela ne suffira jamais à faire du profit.

-3 modèles de financement : Subventions dominantes et billetterie marginale (en France), Dons privés et billetterie (USA) ou Financement mixte.

Ex à Dijon : Subventions collectivités= 84% / Recettes propres = 15,83%

3.1 Les recettes propres

- Les recettes propres des opéras = vente de billets (part billetterie 10 à 20% du total, et 70% des recettes propres), de produits dérivés, diffusions audiovisuelles (20 millions € de recettes dans le cas de l’Opéra national de Paris), vente des programmes de spectacles, tournées du chœur, de l’orchestre ou du ballet, ainsi que des financements privés via le mécénat (2% des recettes propres en moyenne), et vente d’espaces publicitaires

- Location de spectacles à d’autres institutions artistiques et coproduction permettent recettes et économies (le coût des spectacles est alors divisé).

3.2Les financements publiques

Financement publique provient de l’Etat, la région ou les collectivités locales. En général 70 à 90% des revenus (taux record de 92,45% à l’Opéra de Nice)

Budget opéra de Dijon : 11millions € environ : 6,5 millions € par la ville, 300000 € département, 1Million € région, 500000 € Etat.

4. Enjeux et perspectives

4.1 Une gestion difficile

- Financement des collectivités = participation, même indirecte, dans la gestion et les décisions.

Ex : Redressement Opéra National de Paris à partir de 2004 : recadrement sur le plan stratégique et financier. Encadrement pluriannuel de l’Opéra. 16 réunions financières annuelles (très lourd).

-Subventions réellement reçues parfois inférieures à celles promises, jeu comptable complexe.

Ex : subvention de l’Opéra National de Paris bloquée à 103 millions €/ an, l’opéra doit faire preuve de « créativité budgétaire » et augmenter ressources propres, repenser son modèle de financement et sûrement faire davantage appel au secteur privé.

-Le système de fixation des prix, la dimension des jauges, trop réduite, et le taux de remplissage des salles = complexité

4.2 Des stratégies nécessaires

- Réduction des coûts peut passer par externalisation des ressources, partage des coûts et risques avec d’autres théâtres (mise en commun de ressources, coproductions, locations, tournées).

- Notoriété des artistes invités augmente globalement l’autonomie financière des maisons (améliorer remplissage des salles), mais cela contribue également à augmenter ses dépenses. Plus d’autonomie financière dans les théâtres où peu de représentations, mais dans grandes salles bien remplies à dépenser plus est parfois nécessaire.

- Stratégie d’un opéra autant liée à son financement et ses dépenses qu’aux missions assignées aux opéras, tradition de l’établissement, son prestige, la taille de la salle, le droit social, les conditions techniques, les aides de l’Etat…–>Vision d’ensemble nécessaire pour prise de décisions.

àEnjeu actuel: veiller à maintenir des financements publiques en France et augmenter donations privées, pour assurer la pérennité des maisons d’opéra en période de crise.

 

Bibliographie

Ouvrages

  • AGID, Philippe et Jean-Claude Tarondeau (2011), Le Management des opéras : Comparaisons internationales, Descartes & Cie, Paris
  • SAINT CYR, Sylvie (2005), Vers une démocratisation de l’opéra, L’Harmattan, Paris.

Articles

  • LACOMME Jean-Pierre, « Culture, Vive la crise ! » Le Journal du Dimanche, Dimanche 01 Février 2009
  • ROUSSEAU, ANNA, « L’Opéra de Paris joue la créativité budgétaire » Challenges, Février 2011.

Sites Internet

Thèses

  • BERNARDET, Adélaïde (2009) Le rôle des politiques commerciales et marketing dans la réussite financière et culturelle des maisons d’opéra : Une comparaison de l’Opéra national de Paris avec la Stiftung Oper in Berlin, consultable à l’adresse : http://www.opera-management.fr/assets/memoire-a-bernard-et-management-des-operas.pdf
  • WESTERMANN, Christine (2011), Quels sont les effets de la subvention sur l’organisation et l’activité d’un opéra ?, consultable à l’adresse : http://www.opera management.fr/assets/memoire-c-westermann.pdf

Autres

  • Cour des comptes, Rapport sur l’Opéra National de Paris, disponible à l’adresse http://www.ccomptes.fr/fr/CC/documents/RPA/Suite31-Opera-national-Paris.pdf
  • GAILLARD, Yann (2007), Quatre établissements culturels et leur tutelle, Rapport d’information N° 384 fait au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation, Sénat, Session extraordinaire de 2006-2007, Annexe au procès-verbal de la séance du 12
  • LEYMARIE, Olivier, Rencontre à l’Auditorium de Dijon, Présentation des budgets de l’Opéra de Dijon, jeudi 22 septembre 2011.

Sabrina Bouzourene, Elise Iwasinta, Etudiantes Spécialisation CIC, 2011

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Les services de peer-to-peer face au droit : responsabilités et conséquences juridiques

Les neuf juges de la Cour suprême américaine, à l’unanimité, ont établit la responsabilité des services de peer-to-peer pour les actes des millions de «pirates» qui téléchargent de la musique et des films gratuits à travers l’internet. Ils considèrent que les services peer-to-peer encouragent activement les atteintes au droit d’auteur. Cette prise de position a ouvert la possibilité à des poursuites judiciaires contre ces services. Ainsi, les services Grokster et Morpheus seront bien jugés pour infraction au droit d’auteur et pourraient fermer bientôt.

Edwin Juno-Delgado, Responsable de la Spécialisation CIC

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